1. Certaines régions du Nord-Transvaal ont connu, dans les dernières années, des périodes de famine sur lesquelles les autorités sont restées peu loquaces. La sous-nutrition et la malnutrition sont le lot courant. Les organismes privés sont de beaucoup les plus actifs pour tenter d'y porter remède (mais la charité n'est pas un facteur structurel). Quant à la mortalité infantile, elle était, en 1962, de 2,8% des naissances pour les Européens, 5,6% pour les Indiens et 11,9% pour les Métis. (Survey, 1963: p.246.) Il n'y a pas de statistiques pour les Africains mais on esrime qu'elle varie entre 10 et 40% selon les régions. (Survey, 1962: p.201.)
2. Mais, comme
tout ce qui touche au monde des Blancs, l'insécurité
transparaît "Autrefois, quand on faisait une prière
pour la pluie aux Amadlozi [esprits]-- dit un vieil Africain --
la pluie venait dans l'aprés-midi. Maintenant on prie le
Dieu, la pluie vient un mois plus tard; juste quand elle veut
bien venir." (Hellmann, 1948: p. 102.) Pour ceux qui verront
là, à tort ou à raison, l'expression d'une
superstition "primitive", on peut rappeler que la campagne
électorale nationaliste de 1924 imputait au gouvernement
Smuts la responsabilité de la sécheresse: "Le
premier geste du général Hertzog, en tant que Premier
ministre, fut d'ordonner une journée nationale de prières
pour la pluie. La pluie tomba." (Gluckman 1956: p. 38.) La
seule conclusion possible semble être que la superstition
est plus efficace quand elle est européenne.
3. Pour le traditionaliste
africain l'homme blanc n'est pas tout à fait un homme;
mais nous ne croyons pas qu'il y ait là un parallèle
avec la notion de "créature" telle qu'elle ressortait
de l'idéologie boer et afrikaner. L'homme blanc n'est pas
inférieur par essence: simplement, il ne sait pas vivre,
il ne connaît pas les bonnes manières et ce qu'il
faut pour qu'un homme, arrivant à l'âge mûr,
puisse être considéré comme accompli. La difference
esr donc perçue comme sociologique et non comme ontologique.
4. Il faut ici
se remémorer l'histoire de John Mvalo
qui est un Rouge typique (cf. p. 132-134).
5. L'indication
nous est donnée par A. Vilikazi qui rapporte leur désignation
en zoulou: amagxagxa. (The Reserve from within,
dans les Proceedings...) Reader (1966) qui a travaillé
dans le même district n'en fait pas mention.
6. A un fonctionnaire
qui critiquait l'excès de bétail, un vieux Zoulou
répondait: "Vous avez tort. Ce n'est pas que nous
ayons trop de bétail sur nos terres, c'est que nous avons
trop peu de terre pour notre bétail." (Gluckman, 1958:
p. 67.)
7. Mais, dans
ce contexte de grande pauvreté, sinon de misère,
la solidarite des parents peut être une charge très
lourde qui la rend peu désirable.
8. La culture
traditionnelle et l'usage régulier des langues africaines
contribuent à maintenir le sentiment d'appartenance. La
littérature qui fleurissait aux temps des royaumes combattants
a perdu de sa vigueur. Mais elle reste diffusée encore
largement: poèmes de toute sorte, épopées,
rédts versifiés des bardes ambulants, musique et
danse. Pour une grande part cette littérature est récupérée
par les lettrés, et il existe aujourd'hui un courant de
renouveau littéraire en sotho et en zoulou. Les milieux
ruraux semblent connaître encore bien les ceuvres léguées
par la tradition orale.
9. L'absence de
cet enracinement justifie le dédain qui s'affiche souvent
contre les Métis. (La réalité de ce sentiment
est beaucoup plus complexe.) Ceci montre seulement que le tribal
est un langage doué d'une efficacité certaine
pour transcrire une situation actuelle.
10. Il ne faut
pas oublier que dans certaines Réserves existe le droit
de propriété individuel. Diverses mesures administratives
étendent actuellement son champ d'application.
11. Moyenne donne
dans ce contexte une image fausse. Le terme de middle class
se traduit souvent par bourgeoisie; c'est bien à cette
expression que nous arriverons, mais l'introduction de ce concept
ne pourra être justifiée que plus loin (cf. p. 266).
12. Il faudrait
pouvoir étudier systématiquement les techniques
d'interférence administrative: elles jouent surtout au
moment de la succession qui n'est pas réglée strictement
par la coutume. S'il y a affrontement de plusieurs candidats le
jeu de l'administration est facilité. Il peut arriver que
la tribu (ou la fraction) soit capable de régler, de facon
interne, le conflit successoral. Le but de l'administration est
alors de chercher à susciter un leader qui, refusant d'entériner
la succession, tente de provoquer une opposition et des troubles
à la faveur desquels l'administrateur ou le juge pourront
imposer leur arbitrage. Les résultats sont, dans tous les
cas, assez aléatoires.
13. L'affaire
du Sekhukhuneland (région aride du Transvaal oriental)
débute en 1954 après que le chef Moroamoche et la
grande tribu bapedi aient rejeté la proposition de former
une autorité bantoue et celle d'appliquer la loi sur l'Education
bantoue. Diverses manoeuvres sont alors entreprises par C.W.Prinsloo,
haut responsable au ministère des Affaires indigènes:
subversion, corruption, offre de bus, d'écoles, d'un hôpital,
exil de plusieurs membres du conseil tribal, etc. En juillet 1957
une pétition de 30000 signatures demande le retour des
exilés. Le ministère crée une Autorité
bantoue bapedi qui doit ensuite être supprimée faute
de pouvoir fonctionner. Moroamoche est déposé, l'état
d'urgence décrété; en mars 1958 la Cour suprême
donne raison à Moroamoche, qui n'en est pas moins exilé
manu militari au Transkei .
Toute tentative pour trouver des chefs de remplacement ayant échoué, d'importants renforts sont amenés sur place; la police organise alors une campagne d'intimidation terroriste. En mai, le territoire est tout entier submergé par la violence, les incendies et les meurtres. Prinsloo accuse les Bapedi de vouloir créer un "empire de la sagaie". La résistance est enfin ecrasée et plusieurs centaines d'Africains sont lourdement condamnés par les tribunaux (Cf. Fairbairn).
14. Ce type de
structure évoque celui de la période esclavagiste
des plantations dans le South cotonnier des Etats-Unis,
ou au Brésil. une étude comparative serait sans
doute fructueuse.
15. Ce que l'on
appelle ville est à proprement parler la location
(naturelle dorpe, le "village indigène"
en afrikaans), c'est-à-dire une zone d'habitat située
dans la banlieue de la ville proprement dite, cette dernière
étant entièrement réservée aux Européens,
et à leurs domestiques. L'emplacement et les limites des
locations sont maintenant définis, pour chaque cas, par
un décret gouvernemental.
16. Cf. Hellmann,
1948: p. 31-53; et Xhosa in Town, passim.
17Å Il
faut rappeler ici que la bière, jusqu'à ces dernières
années, était prohibée et que le brassage
domestique était strictement interdit. La législation
s'est assouplie depuis lors.
18Å Pauw
suggère, avec toutes les apparences de la raison, que les
modèles traditionnels de comportement ont un vif attrait
émotionnel dans les situations d'insécurité
(p. 196).
19Å Pour
une formulation psychologique, voir de Ridder (enquête fondée
sur l'emploi du T.A.T.).