L'Europe doit
détruire
ses interdits juifs
par
T.G.A
(Traduit par Marcel
Charbonnier et révisé par Fausto Giudice)
Au lieu de criminaliser le
déni de génocide arménien, il faudrait
décriminaliser le déni de l'Holocauste.
Combien magnifique est le coup que l'Assemblée nationale française
vient
d'assener à la vérité, à la justice et à l'humanité!
La semaine dernière, elle a en effet adopté un projet de loi faisant
un
crime de dénier que les Turcs auraient perpétré un génocide à
l'encontre
des Arméniens, durant la Première guerre mondiale. Bravo! Chapeau
bas!
Vive la France!
Mais souhaitons qu'on s'en tienne à ce début [sans suite], dans un
brave
nouveau chapitre [allusion au "Brave New World" de Aldous Huxley,
NdT] de
l'histoire européenne.
En effet, pourquoi le Parlement britannique ne ferait-il pas,
désormais,
un crime du déni que ce sont les Russes qui ont assassiné les
officiers
polonais à Katyn, en 1940?
Pourquoi le Parlement turc ne ferait-il pas désormais un crime du
déni
que la France a eu recours à la torture contre les insurgés en
Algérie?
Pourquoi le Parlement allemand n'adopterait-il pas, désormais, une
loi
faisant un crime du déni du goulag soviétique?
Pourquoi le Parlement irlandais ne criminaliserait-il pas le déni
des horreurs
perpétrées par l'Inquisition espagnole?
Pourquoi le Parlement espagnol n'édicterait-il pas une peine
minimale de
dix années d'emprisonnement à l'encontre de quiconque affirmerait
que
les Serbes n'ont jamais cherché à procéder à un génocide contre les
Albanais au Kossovo?
Le Parlement européen, pour faire bonne mesure, devrait
immédiatement
inscrire dans la loi européenne un texte rendant obligatoire de
qualifier de
génocide le traitement infligé par les colonialistes usa-méricains
aux
Amérindiens.
Le seul regret est que nous ne puissions pas, dans l'Union
européenne,
infliger la peine de mort à ceux qui commettraient ces crimes
haineux.
Mais sans doute qu'avec le temps nous pourrons aussi remédier à
cela?
Oh, Brave Nouvelle Europe!
Cela me dépasse: comment quelqu'un de sensé à moins, bien sûr,
qu'il n'appartienne au lobby arménien en France peut-il voir dans
ce
projet de loi, qui a, de toute façon, absolument toutes les chances
d'être
retoqué par le Sénat, une initiative progressiste et éclairée?
Quel droit le Parlement français a-t-il de prescrire par la loi
la
terminologie historique idoine à caractériser ce qu'un autre pays a
fait à
une troisième nation, voici près d'un siècle?
Le Parlement français a-t-il adopté une loi faisant un crime de
dénier la
complicité de la France de Vichy dans la déportation de juifs
français vers
les camps d'extermination?
L'eût-il fait, j'aurais dit que cela aurait été une erreur, mais je
pourrais
néanmoins respecter l'impératif moral autocritique qui aurait
présidé à
cette décision.
La loi en question, en revanche, n'a pas plus de justification
morale ou
historique qu'aucune des autres hypothèses d'école que j'ai
énumérées.
Et pourtant, il y a près d'un demi-million de citoyens français
d'origine
arménienne dont Charles Aznavour, qui fut naguère un Varinag
Aznavourian qui l'ont demandée.
Il y a, à peu près, le même nombre de citoyens britanniques
d'origine
polonaise; ils seraient donc tout aussi justifiés à exiger une loi à
propos
de Katyn.
Que M. Denis MacShane, un parlementaire britannique d'origine
polonaise, la propose donc dans un esprit de satire, bien sûr!
Et que pensez-vous de l'idée que des parlementaires britanniques
d'origine pakistanaise et indienne proposent des projets de loi
contradictoires à propos de l'histoire du Cachemire?...
Dans un article annoncé à la Une, vendredi dernier, le "Guardian"
affirmait que "les partisans de cette loi sont indubitablement
motivés
par un désir sincère de réparer une injustice nonagénaire"!
J'aimerais partager cette certitude. Se concilier les faveurs
d'électeurs
franco-arméniens et mettre un obstacle supplémentaire devant
l'intégration de la Turquie à l'Union européenne n'auraient-ils pas
été,
par hasard, d'autres motifs possibles?
Mais la spéculation sur les motivations, c'est bon pour les poires.
Tout lecteur intelligent comprendra que ma critique n'a rien à voir
avec
la mise en doute des souffrances des Arméniens massacrés, chassés ou
contraints à fuir, craignant pour leur vie, durant et après la
Première
guerre mondiale.
Mais deux torts ne font pas un droit.
Personne ne peut légiférer en matière de vérité historique. Si tant
est
que la vérité historique puisse être établie un jour, elle ne peut
être
trouvée qu'à travers une recherche historique illimitée, les
historiens
discutant et argumentant sur les preuves et les faits, mettant à
l'épreuve
et remettant en cause mutuellement leurs affirmations, sans avoir à
redouter d'être mis en examen ou poursuivis.
Dans le débat politique très tendu qui caractérise notre époque,
cette
proposition de loi est exactement un pas dans la mauvaise direction.
Comment pouvons-nous critiquer de manière crédible la Turquie,
l'Egypte ou d'autres pays ( pour avoir porté atteinte à la
liberté
d'expressionen en légiférant la protection légalisée des tabous
historiques, nationaux ou religieux ) si nous-mêmes, nous faisons
pire ?
Ce week-end, à Venise, j'ai à nouveau entendu un universitaire
musulman prestigieux protester contre notre deux poids deux
mesures.
Nous leur demandons d'accepter que nous insultions les tabous
musulmans, mais les juifs accepteraient-ils que quiconque soit libre
de
nier l'Holocauste?
Bien loin de créer de nouveaux tabous imposés par la loi au sujet de
l'histoire, de l'identité nationale ou de la religion, nous devrions
nous
atteler à démanteler ceux qui encombrent encore notre code pénal.
Les pays européens, qui en ont, doivent non seulement abroger leurs
lois sur le blasphème, mais aussi leurs lois interdisant le déni de
l'Holocauste. Tant que cela n'aura pas été fait, il sera impossible
de réfuter l'accusation de deux poids deux mesures portée contre
eux.
Dernièrement, j'ai entendu le philosophe juif Bernard-Henri Lévy se
livrer à d'impressionnantes contorsions intellectuelles afin
d'expliquer
pourquoi il s'opposait à toute loi restreignant les critiques envers
la
religion musulmane, tout en soutenant celles qui interdisent le
"négationnisme" ( c´est´-à-dire le révisionnisme ).
Une chose est, disait-il,
de remettre en question une croyance religieuse,
mais nier un fait historique est une tout autre chose.
Mais ça ne marche pas.
Les faits historiques sont établis, précisément, grâce au fait
qu'ils sont
discutés et testés ab absurdo.
Sans ce processus - de révision (révisionnisme) et de mise à
l'épreuve
pouvant aller même jusqu'à les réexaminer, les réfuter ou les nier
totalement nous n'aurions jamais pu découvert quels faits sont
véritablement veridiques et incontestables.
Une telle nécessité requiert de prendre des décisions douloureuses.
On peut, par exemple, ne rien avoir d'autre que de l'aversion envers
certaines opinions révisionnistes de David Irving. Mais je suis
persuadé
qu'il ne devrait pas être enfermé dans une prison autrichienne pour
ses
recherches historiques ou pour ses opinions.
Vous pouvez répliquer que la fausseté de certaines de ses
affirmations
a été, de fait, établie par un procès devant un tribunal
britannique.
Ce n´est pas aux tribunaux de diriger les recherches historiques, de
décider ce qui est vrai ou faux ou d´écrire l´histoire!
La loi et les tribunaux britanniques sont pour le droit à un débat
historique honnête et libre.
Et ce n'était pas l'Etat britannique qui a poursuivi Irving
pour
"négationnisme". C'était Irving lui-même qui a poursuivi devant un
tribunal britanique une journaliste juive pour diffammation.
Aujourd'hui, si nous voulons défendre la liberté d'expression dans
nos pays
européens respectifs et la soutenir là où elle est actuellement
déniée, nous
devons exiger que David Irving soit libéré de sa prison
autrichienne.
Dans l'intérêt supérieur de l'Europe, nous devons encourager les
Autrichiens
à l'abroger ses lois interdisant le révisionnisme.
Ce n'est que lorsque nous serons prêts à admettre quel´on puisse
toucher à
nos propres vaches sacrées que nous pourrons crédibilité
exiger que les
islamistes, les Turcs et d'autres fassent de même.
Il est grand temps de briser les tabous, et non d'en ériger de
nouveaux.
Nous devons mettre en pratique ce que nous prêchons.
T.G.A. |