« La reconquête du Sinaï, avec ses ressources actuelles, est un objectif prioritaire que les accords de Camp David et les accords de paix empêchaient jusqu’ici d’atteindre (…) Privés de pétrole et des revenus qui en découlent, condamnés à d’énormes dépenses en ce domaine, il nous faut impérativement agir pour retrouver la situation qui prévalait dans le Sinaï avant la visite de Sadate et le malheureux accord signé avec lui en 1979.
La situation économique de l’Égypte, la nature de son régime, et sa politique panarabe, vont déboucher sur une conjoncture telle qu’Israël devra intervenir…
L’Égypte, du fait de ses conflits internes, ne représente plus pour nous un problème stratégique, et il serait possible, en moins de 24 heures, de la faire revenir à l’état où elle se trouvait après la guerre de juin 1967. Le mythe de l’Égypte « leader du monde arabe » est bien mort (…) et, face à Israël et au reste du monde arabe, elle a perdu 50% de sa puissance. À court terme, elle pourra tirer avantage de la restitution du Sinaï, mais cela ne changera pas fondamentalement le rapport de force. En tant que corps centralisé, l’Égypte est déjà un cadavre, surtout si l’on tient compte de l’affrontement de plus en plus dur entre musulmans et chrétiens. Sa division en provinces géographiques distinctes doit être notre objectif politique pour les années 1990, sur le front occidental.
Une fois l’Égypte ainsi disloquée et privée de pouvoir central, des pays comme la Libye, le Soudan, et d’autres plus éloignés, connaîtront la même dissolution. La formation d’un État copte en Haute-Égypte, et celle de petites entités régionales de faible importance, est la clef d’un développement historique actuellement retardé par l’accord de paix, mais inéluctable à long terme.
En dépit des apparences, le front Ouest présente moins de problèmes que celui de l’Est. La partition du Liban en cinq provinces (…) préfigure ce qui se passera dans l’ensemble du monde arabe. L’éclatement de la Syrie et de l’Irak en régions déterminées sur la base de critères ethniques ou religieux, doit être, à long terme, un but prioritaire pour Israël, la première étape étant la destruction de la puissance militaire de ces États.
Les structures ethniques de la Syrie l’exposent à un démantèlement qui pourrait aboutir à la création d’un État chiite le long de la côte, d’un État sunnite dans la région d’Alep, d’un autre à Damas, et d’une entité druze qui pourrait souhaiter constituer son propre État —peut-être sur notre Golan— en tout cas avec l’Houran et le Nord de la Jordanie. (…) Un tel État serait, à long terme, une garantie de paix et de sécurité pour la région. C’est un objectif qui est déjà à notre portée.
Riche en pétrole, et en proie à des luttes intestines, l’Irak est dans la ligne de mire israélienne. Sa dissolution serait, pour nous, plus importante que celle de la Syrie, car c’est lui qui représente, à court terme, la plus sérieuse menace pour Israël. Une guerre syro-irakienne favoriserait son effondrement de l’intérieur, avant qu’il ne soit en mesure de se lancer dans un conflit d’envergure contre nous. Toute forme de confrontations inter-arabe nous sera utile et hâtera l’heure de cet éclatement. (…) Il est possible que la guerre actuelle contre l’Iran précipite ce phénomène de polarisation.
La Péninsule arabique toute entière est vouée à une dissolution du même genre, sous des pressions internes. C’est le cas en particulier de l’Arabie saoudite : l’aggravation des conflits intérieurs et la chute du régime sont dans la logique de ses structures politiques actuelles.
La Jordanie est un objectif stratégique dans l’immédiat. À long terme, elle ne constituera plus une menace pour nous après sa dissolution, la fin du règne de Hussein, et le transfert du pouvoir aux mains de la majorité palestinienne.
C’est à quoi doit tendre la politique israélienne. Ce changement signifiera la solution du problème de la rive occidentale, à forte densité de population arabe.
L’émigration de ces Arabes à l’Est —dans des conditions pacifiques ou à la suite d’une guerre— et le gel de leur croissance économique et démographique, sont les garanties des transformations à venir. Nous devons tout faire pour hâter ce processus.
Il faut rejeter le plan d’autonomie, et tout autre qui impliquerait un compromis ou une participation des territoires, et ferait obstacle à la séparation des deux nations : conditions indispensables d’une véritable coexistence pacifique.
Les Arabes israéliens doivent comprendre qu’ils ne pourront avoir de patrie qu’en Jordanie (…) et ne connaîtront de sécurité qu’en reconnaissant la souveraineté juive entre la mer et le Jourdain. (…) Il n’est plus possible, en cette entrée dans l’ère nucléaire, d’accepter que les trois quarts de la population juive se trouve concentrée sur un littoral surpeuplé et naturellement exposé ; la dispersion de cette population est un impératif majeur de notre politique intérieure. La Judée, la Samarie, et la Galilée, sont les seules garanties de notre survie nationale. Si nous ne devenons pas majoritaires dans les régions montagneuses, nous risquons de connaître le sort des Croisés, qui ont perdu ce pays.
Rééquilibrer la région sur le plan démographique, stratégique et économique, doit être notre principale ambition ; ceci comporte le contrôle des ressources en eau de la région qui va de Beer Sheba à la Haute-Galilée et qui est pratiquement vide de juifs aujourd’hui. »